Lecture : « Beaufort, l’amiral du vent » de Raymond Reding

Il y a bien longtemps que je n’avais rédigé une note de lecture dans cette rubrique. Manque de temps, ou manque de découverte ? J’ai de nouveau retrouvé un réel enthousiasme littéraire à la lecture de cet excellent ouvrage de Raymond Reding : « Beaufort, l’amiral du vent ».

Comme tout navigateur qui se respecte, je connais l’échelle de Beaufort depuis mes premiers bords en école de voile, mais, honte à moi, je n’avais jamais cherché à en savoir plus sur ce fameux Francis Beaufort ! Raymond Reding, passé comme moi par les Glénans, comble enfin cette lamentable lacune avec le plus grand bonheur.

A la fois biographie et récit d’aventures, son livre veut « reconnaître la part de l’héritage que Francis Beaufort a laissé aux navigateurs de notre temps », comme il l’exprime dans son prologue. Il nous convie à « une aventure maritime, géographique, un voyage dans le temps et dans l’espace, sur l’immensité des océans » que Francis Beaufort a traversés au cours de sa longue vie.

Embarqué à 14 ans sur un navire de commerce comme aspirant-stagiaire au service du capitaine, il poursuivra par une longue et laborieuse carrière dans la Royale Navy. Passionné d’astronomie et de cartographie, initié depuis son adolescence au maniement des sextants, chronomètres et autres instruments de mesure pour lesquels il démontre une disposition certaine, il réalisera tout au long de ses navigations un immense travail de cartographie maritime qui sera à l’origine du service hydrographique de l’Amirauté Britannique dont il prendra la direction des décennies plus tard.

Ses multiples embarquements dans la marine à voile l’ont également amené à s’interroger sur la force du vent et les phénomènes atmosphériques dont on ignorait tout à son époque. Il développe l’idée visionnaire de collecter tous les relevés minutieux des observations effectuées partout dans le monde par les navires de la Royal Navy, afin d’établir des cartes des vents qui devraient permettre de comprendre les phénomènes qui les provoquent. En 1806, il reprend l’idée d’une échelle de vent ébauchée par plusieurs prédécesseurs, et l’affine en quantifiant sur treize niveaux la force du vent par les réductions de voilures successives qu’elle impose au navire à mesure qu’elle augmente. Mais son échelle ne sera introduite qu’en 1829 à la Royale Navy, et c’est seulement dix ans plus tard qu’elle sera imposée par l’Amirauté à toutes les unités de la Royal Navy. Et c’est seulement à la Conférence Météorologique Internationale de 1853 qu’elle deviendra la référence internationale pour estimer la force du vent. Beaufort avait alors soixante dix-neuf ans !

Le récit mouvementé de la carrière de Francis Beaufort traverse également l’époque non moins mouvementée de l’Europe, de la révolution française aux guerres napoléoniennes. Raymond Reding nous en donne, pour une fois, une vision très documentée du point de vue britannique. Un rappel historique qui vient combler pour moi les insuffisances d’une scolarité fantaisiste.

Un ouvrage passionnant, instructif, indispensable à la culture générale du plaisancier que je suis. Il n’est jamais trop tard…

L’auteur :

Chirurgien à Bruxelles, professeur à l’Université catholique de Louvain, membre de l’Académie Royale de Médecine, passionné de navigation et d’histoire maritime.

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