Comment l’iPhone sait où vous êtes

Cet article a été publié sur Macworld.com par Glenn Fleishman. Il explique de manière très précise et didactique le fonctionnement des services de localisation des appareils iPhone et iPad d’Apple et apporte un éclairage sur les données que Apple récupère sur nos appareils. Comme parfois une petite dose de connaissance théorique ne nuit pas, je vous en livre ici la traduction intégrale. La source est consultable par ce lien.

Prenez le temps, c’est assez long…

Apple utilise le GPS, le Wi-Fi, et les antennes de téléphonie cellulaire pour obtenir et afficher les données de localisation.

par Glenn Fleishman, Macworld.com 28 avril 2011 16:00

L’expérience des utilisateurs d’iPhone avec le GPS est si rapide, si instantanée, que la réponse d’Apple mercredi au sujet de localisation sur iOS pourrait presque sembler déroutante :

Le calcul de la localisation d’un téléphone en utilisant seulement les données satellites GPS peut prendre jusqu’à plusieurs minutes. L’iPhone peut réduire ce temps à quelques secondes à l’aide de points d’accès Wi-Fi et des données des antennes de téléphonie cellulaire pour trouver rapidement les satellites GPS. »

Quelques minutes ? Mon iPhone ne prend-t-il pas seulement quelques secondes pour trouver où je suis ?

Eh bien, oui… mais seulement quand il s’engage dans une série de « trucs » pour éviter un long processus qui a été de rigueur quand les premiers récepteurs GPS sont apparus. En simplifiant les choses, Apple n’est pas tout à fait précis sur la façon dont tout cela fonctionne et ce que cela fait. Alors laissez-moi vous expliquer où le Wi-Fi et les antennes de téléphonie cellulaire s’intègrent dans l’équation.

12,5 minutes pour localiser

Les premiers récepteurs GPS mettaient 12,5 minutes à partir d’un démarrage à froid pour verrouiller une position. D’autres localisations, après quelques temps dans la même région, pouvaient encore prendre plusieurs minutes. Si vous aviez mis un récepteur GPS hors tension pendant plusieurs semaines ou si vous vous étiez déplacé de quelques centaines de kilomètres, un démarrage à froid pouvait être à nouveau nécessaire.

Le GPS repose sur deux facteurs pour créer un ensemble de coordonnées précises du lieu où vous vous tenez : le temps et l’espace. Les satellites GPS diffusent des signaux horaires précis, en utilisant une horloge atomique intégrée, associés à leur position courante. Ils diffusent également la position de tous les autres satellites dans le ciel, c’est l’éphéméride [de la constellation (*)].

Toutes les 30 secondes, un satellite GPS émet un horodatage, sa position courante ainsi que des informations de position moins précises pour les autres satellites GPS. Il faut 25 de ces émissions (donc 12,5 minutes) pour obtenir la liste complète des positions des satellites. Cette information doit être décodée pour qu’un récepteur puisse ensuite interpréter correctement les signaux des satellites qui sont à sa portée.

Si vous connaissez la position de quatre satellites et l’heure à laquelle chacun a envoyé ses informations de position, vous, ou plutôt votre récepteur GPS, pouvez calculer à moins de 10 mètres la latitude, la longitude et l’altitude de votre localisation actuelle avec l’heure exacte. Avec trois satellites, vous perdez d’élévation, mais un appareil peut encore suivre le déplacement de façon assez précise. Les récepteurs GPS autonomes peuvent recevoir simultanément de multiples satellites, et en suivre plus de quatre. D’autres techniques peuvent également améliorer la précision.

Mais, diable, je n’ai pas 12,5 minutes. Je suis un homme très occupé ! Donnez-moi cette localisation plus vite !

Apporter une assistance au GPS

Donc, les fabricants de puces et composants GPS sont arrivés avec une foule de moyens pour raccourcir le temps d’attente, appelé GPS assisté (A-GPS). Au lieu de s’appuyer sur les téléchargements en direct des données de positionnement des satellites, les futures localisations peuvent être estimées avec une précision suffisante pour déterminer les positions grossières des satellites, et obtenir un correctif à chaque point où des informations mises à jour sont récupérées. Ces estimations peuvent être téléchargées via une connexion réseau en quelques secondes ou même calculées directement sur le récepteur.

L’heure peut aussi être utilisée comme indicateur. Avec une heure précise, les données satellitaires partielles peuvent être décodées pour obtenir un verrouillage plus rapide ou récupérer les informations appropriées à utiliser. Dans les réseaux CDMA, tel que celui utilisé par Verizon, le temps atomique synchronisé du GPS est requis pour les opérations de base du réseau, ce qui de fait rend ces informations disponibles. (En fait, les antennes de téléphonie cellulaire CDMA intègrent des unités GPS permettant de maintenir une meilleure synchronisation de l’heure atomique.)

Ces fonctions supplémentaires sont ce qui fait GPS dans A-GPS. Bien que beaucoup de gens comprennent mal A-GPS et pensent que c’est un faux système GPS, ce n’est pas le cas : A-GPS nécessite un récepteur GPS pour fonctionner. L’iPhone et l’iPad 3G d’Apple intègrent une puce A-GPS, comme presque tous les appareils concurrents équipés de GPS, notamment les téléphones Androïd. (A-GPS permet l’utilisation de circuits GPS beaucoup moins chers et plus simples dans les téléphones, réduisant les coûts et les fuites de la batterie.)

C’est là où la déclaration d’Apple mercredi s’écarte d’une précision optimale. Apple utilise A-GPS pour des améliorations natives de verrouillage GPS, le réseau Wi-Fi et l’emplacement des antennes cellulaires sont des facteurs supplémentaires fournissant une connexion initiale rapide tout en améliorant la précision du GPS.

Les fournisseurs de réseaux cellulaires ont une mesure GPS extrêmement précise de l’emplacement de toutes leurs antennes. Avec une base de données de ces antennes, vous pouvez prendre des mesures de l’intensité du signal de celles à portée les unes des autres – qui peuvent être des dizaines – par trilatération afin de situer une zone de chevauchement entre elles. (La trilatération utilise le chevauchement des triangles pour déterminer une zone d’intersection, la triangulation utilise la mesure des angles et des distances pour déterminer un point central).

Mais les antennes de téléphonie cellulaire sont trop éloignées les unes des autres pour fournir une précision de type GPS, et elles ne fonctionnent pas bien dans les zones moins peuplées, voire les banlieues, où la couverture est moins nécessaire que dans un environnement urbain.

A la recherche du Wi-Fi

Apple, Google et d’autres se tournent vers le positionnement Wi-Fi pour cela. Le positionnement Wi-Fi, développé par Skyhook Wireless, demandait à l’origine des véhicules spécialement équipés d’antennes Wi-Fi et de récepteurs GPS ultra sensibles qui circulaient autour des villes afin de relever les identifiants réseau (l’adresse matérielle unique diffusée par les stations de base Wi-Fi) et les intensités relatives du signal à des milliards de points. Comme avec les antennes de téléphonie cellulaire, si vous aviez suffisamment de réseaux et assez d’informations sur la puissance du signal, vous pouviez déterminer une position approximative.

Il est très facile pour un périphérique réseau comme un smartphone de prendre un instantané des données Wi-Fi et de sources cellulaires à proximité et de les transmettre à un serveur qui répond par un ensemble approximatif de coordonnées. Selon les Q&R d’Apple, l’entreprise franchit une étape supplémentaire par la mise en cache de sous-ensembles de données sur les réseaux et les antennes de proximité afin de réduire l’activité du réseau et d’accélérer ces requêtes. Cela déplace aussi certains calculs sur le téléphone ou la tablette en dehors des services de localisation. Et cela signifie que s’il n’y a pas de connexion cellulaire ou Wi-Fi disponible, cette information de localisation peut déjà être utile. (C’est ce qui explique un mystère que j’ai vu dans lequel un iPad Wi-Fi seul ou un iPod Touch peut apparemment calculer une position quand il est hors-réseau).

Apple a, pour la première fois, dévoilé le positionnement Wi-Fi et cellulaire avec l’iPhone d’origine dans une mise à jour iPhone iOS au début de 2008. Ce fut le coup d’éponge d’Apple sur le fait que l’iPhone original ne disposait pas de récepteur GPS, ce qui n’a débuté qu’avec l’iPhone 3G.

Vous pouvez voir l’une ou l’autre de ces fonctions en action quand vous lancez l’application Plans. En général, vous voyez un grand cercle bleu apparaissant presque instantanément, à la suite de ce qui doit être une consultation de la base de données locale. Le cercle se réduit à mesure que plus d’informations est utilisé, toujours à partir des sources cellulaires et Wi-Fi, pour créer une meilleure trilatération. Ces données sont également utilisés pour fournir plus d’indices dans le décodage des meilleures informations des satellites GPS, permettant l’utilisation de très petits fragments de données ou même des signaux bruts pour obtenir un meilleur verrouillage. Enfin, le cercle devient un simple point quand iOS est convaincu d’avoir obtenu un solide verrouillage GPS. (**)

Fin des véhicules, entrée dans le nuage

Apple a abandonné Skyhook Wireless en tant que fournisseur de données à partir de iOS 4.0 pour l’iPod Touch et l’iPhone, et la mise à jour 3.2 pour l’iPad seul. Il y a une raison à cela. Lorsque votre appareil iOS utilise le positionnement Wi-Fi, il envoie un aperçu du paysage des signaux courants à Apple, qui dit dans le Q&R que cette information est utilisée de façon anonyme pour des données collectées de meilleure qualité. Mais c’est aussi une incroyable source d’informations marketing utiles, sur la fréquence à laquelle les utilisateurs s’appuient sur les mises à jour de localisation, et où ces utilisateurs sont regroupés. Il peut être utilisé pour le ciblage des publicités et à d’autres fins outre les applications qui cherchent des données de localisation.

Bien sûr, le Q&R d’Apple explique clairement que tous les instantanés Wi-Fi ne sont pas envoyés à Apple. Certains algorithmes commandent ceux qui sont envoyés pour améliorer la base de données. Avec les sources collectées, Apple évite d’avoir à envoyer des camions sur la route. Google a apparemment engagé la même démarche, en utilisant ses véhicules Street View pour compléter les sources collectées par Android. (Ils ont rencontré des difficultés de deux sortes à ce sujet. Tout d’abord, pour avoir apparemment accidentellement enregistré en clair des données de réseau Wi-Fi, ce qui a abouti à des amendes, des décisions et l’arrêt de ce type d’analyse dans de nombreux pays. Deuxièmement, pour avoir prétendument violemment incité deux fabricants majeurs de combinés téléphoniques à changer leurs d’offres pour s’appuyer sur des données de Google).

GPS est, en fait, la science des fusées à plusieurs étages. Mais la manière dont Apple combine et complète les informations de sources multiples pour créer un verrouillage rapide et précis explique pourquoi pour nous, en tant qu’utilisateurs, c’est « tout GPS » et fonctionnement parfait.

Glenn Fleishman est un contributeur majeur à Macworld, il écrit régulièrement à propos de données sans fil. Son dernier livre est « Take Control of iPhone and iPod touch Networking & Security, iOS 4 Edition » (Take Control Ebooks).


(*) Note du traducteur.
(**) Voir l’article Le GPS de l’iPhone : quelques précisions

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