Cartes électroniques, routage et rase-cailloux

La relation récente d’une expérience vécue par un utilisateur de iNavX et de la fonction routage de Weather4D PRO m’invite à apporter une mise en garde à l’attention des navigateurs novices dans l’utilisation de l’informatique.

Un parcours de régate, départ de St Hélier (Jersey) et arrivée à Granville, optimisé dans Weather4D PRO avec le modèle à mailles fines GCWF et les courants MyOcean, donnait la route suivante dans iNavX :

routage 1

La route optimisée transférée dans iNavX

Le vent de Sud-Est modéré et un courant de Nord favorable à l’Est de Jersey a tracé une route passant sur le plateau rocheux débordant Jersey au Sud-Est. Lors de l’optimisation, il est visible que la contrainte de distance minimum à la côte, définie comme argument de routage dans Weather4D PRO, avait gardé sa valeur par défaut de 0 MN.

routage 2

La route optimisée passe sur le plateau du Violet Bank

Il apparaît comme une évidence que cette route n’était pas à suivre à la lettre ! En étudiant de plus près la topologie des lieux, une option possible par le passage du Violet Channel permettait de rejoindre le courant favorable en laissant le plateau de l’Arconie à tribord. Mais il fallait pour cela une bonne connaissance du passage, de l’orientation du courant, et une excellente visibilité.

Sur les captures ci-dessus, on voit la ligne pointillée noire de la trace réellement parcourue par le navigateur. Celui-ci, en marin avisé, a préféré perdre quelques places en tirant des bords en eaux saines plutôt que s’aventurer dans un passage délicat.

Avec les applications de navigation récentes associées à une cartographie électronique, le confort apporté ne doit pas occulter le sens marin. Car, contrairement à l’apparence, une part inconnue d’imprécision demeure liée à la mise en œuvre de ces technologies.

En effet, bien que la précision du système de positionnement GPS soit incontestable, il n’en est pas forcément de même pour la cartographie. Les cartes électroniques sont, pour la plupart, des reproductions de cartes papier dont les levées (les relevés hydrographiques) peuvent parfois dater, dans certaines zones, d’une époque où les moyens de positionnement étaient bien moins précis qu’aujourd’hui. D’autre part, les techniques de reproduction peuvent être  entachées d’erreur, comme, par exemple, une mauvaise conversion du système géodésique de la carte d’origine. En conséquence, si ma position est précise à trois mètres près, le rocher affleurant porté sur ma carte électronique à cent mètres de ma position peut très bien, en réalité, ne se situer qu’à quelques mètres.

En régate côtière, le rase-cailloux est souvent tentant, mais prenons garde à la fausse sécurité que nous apporte une icône de navire défilant sur une carte électronique, cela ne remplacera jamais de bons alignements vérifiés dans le paysage autour du bateau (*).

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(*) Voir Des alignements et du sextant
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7 Replies to “Cartes électroniques, routage et rase-cailloux”

  1. Merci pour ces quelques informations. Il est vrai que mon point de départ était le port de Bonifacio. Je me sers également pour les prévisions du module COAMPS Europe – Méditerranée. Je n’ai pas encore souscrit d’inscription à Geat Circle, par contre j’ai constaté que lorsque Weather4D Pro affichait « importation réussie » sans la deuxième fenêtre en arrière plan mentionnant les modèles importés, le routage mentionnait systématiquement « erreur impossible de calculer le routage » La distance mini de la côté pour mon routage est laissée à zéro.
    Encore merci pour votre aide.

  2. J’ai un « petit » soucis avec Weather4D Pro, après avoir importé ma route avec iNavX, je lance le routage sur Weather4D et un message d’erreur apparaît me disant que le routage n’a pas pu être calculé. Mais sans plus d’informations. Ça fait un moment que je boutique pour voir d’où vient le problème sans trouver de solution.
    Quelqu’un peut-il m’aider svp ? et merci d’avance…
    Mon mail : jeanchav@hotmail.com

    1. Cela peut provenir de plusiuers causes :
      1. Le waypoint de départ se situe en dehors de la zone de prévision.
      2. L’heure de départ est antérieure au début de la prévision.
      3. Le waypoint est placé trop près de la côte, le trait de côte vectoriel ayant une précision de l’ordre de 1000 m. en GFS et 200 m. en GCWF. Attention au réglage de routage « Distance mini de la côte ».

  3. Une précision sur la qualité de routage et des indications météo prises en compte dans W4D pro.
    Il y a quelques jours j’ai pu constater que les prévisions météo que je téléchargeais avec W4D en GCWF n’avaient rien à voir avec les conditions réelles en mer. J’ai pu échanger à ce sujet à la fois avec Olivier Bouyssou le concepteur du logiciel et Gerald Bibot de Great Circle.
    Je dois dire que c’était la première fois que je constatais des écarts du simple au double entre réalité vécue et fichiers grib chargés. L’explication est simple en fait et il me semble bon de la préciser pour tous ceux qui pourraient l’ignorer. Le logiciel W4D prend en compte le vent synoptique. Il ne tient pas compte des rafales et, dans cette période de la Normandy Channel Race, on a été servi en Manche. Olivier travaille en ce moment sur une MAJ prochaine qui intégrera les rafales et le vent à 925 hPa. Je ne sais pas si cette MAJ sera accessible pour tous ou seulement à ceux ayant souscrit à l’abonnement maille fine Great Circle ? Gageons que lorsque ce sera disponible on frisera la perfection avec cet outil génial. En attendant je profite du fait que mon abonnement Great Circle par W4D donne un droit sur la même période à l’ensemble des données du site Belge pour croiser les infos de W4D avec celles de Squid2. Mais là je sais que je sors un peu du cadre du site de Francis puisqu’il faut un PC et internet à bord….
    En espérant que cette précision apporte un plus aux utilisateurs de W4D et pourquoi pas suscite un commentaire avisé de Mr. Fustier

    1. Mr. Fustier répond bien volontiers 🙂
      J’apprécie cette interractivité entre les utilisateurs et le développeur, qui est aussi, je le rappelle, un navigateur. Il est impossible pour les modestes testeurs, dont je fais partie, de rencontrer tous les cas de figure en navigation. Tes retours d’expérience, celles de Jean et de quelques autres permettent de faire avancer l’application au plus grand bénéfice de tous. Je dirais, reprenant la chanson de Michel Fugain : Bravo et merci !

  4. Merci à Francis pour ces précisions pleines de bon sens « marin ».
    C’est vrai que les progrès de l’électronique pourraient encourager les marins à l’oubli des pratiques du passé. Ce serait une grave erreur. Si pour les vieux navigateurs dont je suis les réflexes passés restent actifs, qu’en est-il pour les débutants. C’est bien d’attirer l’attention sur la réalité. Avec tout le matériel possible on se rassure et on sécurise ses options prises. Mais comme le font les coureurs, une veille active reste indispensable et l’adaptation des conditions réelles rencontrées est à relativiser avec les données informatiques. Nobody is perfect.

  5. Pas très prudent de faire un routage de port de départ à port d’arrivée dans ces parages.
    Une solution aurait été de faire une route préliminaire avec deux ou trois points de passage obligés afin d’éviter les dangers. W4D Pro effectue dans ces cas là un routage efficace et beaucoup plus sécurisé qui ne dispensera pas comme le dit Francis de vérifier le paysage

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